POUR UNE GAUFRE A LIEGE

Ce texte revient sur un voyage vélo effectué par Thierry et Lucile Mezenge, père et fille. S’il est écrit par la main de Thierry, vous trouverez parfois des petites astérisques numérotées qui renvoient à des commentaires rédigés par Lucile afin de mêler les deux regards.

-Allo papa ?

-Bonjour ma grande.

-J’envisage d’aller manger une gaufre à Liège. Ça te dit de m’accompagner ?

– Bien sûr, je fais le plein de la voiture et j’arrive. Mais pourquoi à Liège ?Il doit y avoir moyen de trouver la même chose plus près…

-Non non, pas en voiture, je pars à vélo de Dijon pour rejoindre Liège en traversant le Luxembourg et les Ardennes belges.

– ???????

-Et puis je compte bien manger des frites et boire une bonne bière.

-Des frites et des bières ????? Je gonfle mon vélo et j’arrive !

-Super !!!

Et voila comment, encore une fois, je me retrouve à équiper mon vélo de toutes ses sacoches.

Petit changement cette fois, je ne pars pas avec « ma mule » qui,depuis le temps, à bien mérité son repos mais avec ma toute jeunette « bourrique », nouvellement arrivée à la maison et bien plus adaptée à ce genre de voyage. Je réserve vite fait un billet de train pour Dijon et nous voilà fin prêts pour démarrer ce nouveau périple.

Le départ du premier jour se fera sous un soleil éclatant et les kilomètres s’enchaineront sans problèmes. Nous retrouverons même un copain du voyage de l’année dernière, très content de repartir avec nous. J’ai nommé : le vent !!!!! Seul petit bémol, je ressens des maux de gorge un peu inquiétants depuis la veille et cela ne s’arrange pas du tout sur le vélo. Nous cherchons donc dans l’après-midi une pharmacie qui, au vu de mes symptômes, me conseille de pratiquer un test covid.

Résultat, je suis positif !!!! Ah que merde… Du coup Lucile y passe aussi mais le sien s’avère négatif. Ouf.

Et maintenant ? Gros dilemme. Soit c’est le retour à la maison et Lucile poursuit seule, soit on continue en prenant toutes les précautions possibles ??? Finalement, nous décidons de continuer, d’autant plus que je ressens les effets du covid uniquement dans l’après-midi où les montées me semblent plus dures. Ce sera donc port du masque permanent pour moi, sauf sur le vélo.

Après cette première journée de 125 kilomètres qui comprenait 1388 mètres de dénivelé, nous passons la nuit dans une chambre d’hôte à Luzy sur Marne chez des gens forts sympathiques.

Le lendemain, nous nous mettons en route afin de rallier Pagny sur Meuse. Nous faisons un petit crochet par le centre-ville de Chaumont pour acheter un chargeur de téléphone car Lucile a oublié le sien¹. Petit café dans la foulée et nous prenons le vrai départ en toute fin de matinée. Cette deuxième journée ne comptera que 118 kilomètres pour 1229 mètres de dénivelé mais, à vélo, les chiffres ne correspondent pas toujours aux efforts consentis. Et là, je peux vous dire que des efforts il a fallu en faire à la pelle !

Les premiers kilomètres se font plutôt bien. Nous traversons des villages aux noms improbables comme « Bourdons sur Rognon » !!!! La discussion s’engagera pour savoir comment, et surtout par qui, sont attribuées ces appellations. Dans ce cas précis, on a convenu d’un commun accord que c’était un lendemain de cuite…

Nous avons bien fait d’acheter des sandwichs le matin car nous ne croiserons absolument rien d’ouvert, ni restaurant, ni boulangerie, ni café, rien. Nous mangeons sur le bord de la route puis nous repartons. Rapidement, ce n’est plus très rigolo. La faute d’abord à notre copain le vent, déchainé ce jour-là, qui nous soufflera fort en pleine poire toute la journée. Les dommages auraient pu être contenus mais c’était sans compter la topographie du plateau de Langres que nous traversons.Une fois escaladées les côtes qui nous y amènent, c’est bien simple, il n’y a plus rien !!! Les cultures font vingt centimètres de haut dans le meilleur des cas, il n’y a pas un arbre en vue et nous traversons des villages déserts tous les dix kilomètres. Je ne vous parle pas des lignes droites interminables qui te font voir où tu seras dans trente minutes…

Le vent s’en donne à cœur joie, c’est infernal. En milieu d’après midi, nous faisons une pause au pied d’un monument au mort dans un petit village toujours aussi calme. Le vent associé aux effets du covid ont eu raison de mes forces. Il nous reste quarante kilomètres et, à cet instant, je me demande bien comment je vais pouvoir les faire. Je n’en parle évidemment pas à Lucile qui n’est pas loin d’être dans le même état que moi². Cent mètres après être repartis,Lucile décide que c’est le bon moment pour crever…Réparation express et nous repartons. A partir de là, je décide de ne plus lutter contre le vent, je laisse fluctuer ma vitesse en fonction de ses coups de butoir. Nous finirons par redescendre de ce foutu plateau de mer** pour finir les vingt dernières bornes davantage abrités. Nous arrivons à l’hôtel, fourbus, avec l’idée de nous reposer. Raté. Le restaurant de l’hôtel est fermé le week-end !!! La réceptionniste croit nous rassurer en nous disant qu’il y a un restaurant à trois minutes en voiture…Gloups… Je ne sais pas si Lucile a envie de l’étriper ou de se mettre à pleurer… …on est à pied bécasse… Quand ça veut pas, ça veut pas.

A pied, nous mettrons vingt minutes à l’aller, et un peu moins au retour, car il fait très frais, sur le bord d’une route sans éclairage et sans trottoir à éviter les véhicules que nous croisons et qui se demandent sûrement ce que nous foutons là. Allez, vite au lit pour oublier cette journée.

C’est déjà le troisième jour et il nous faudra faire 115 kilomètres en grimpant 576 mètres pour rejoindre Thionville. Petit coup de stress en écartant le rideau : le vent est toujours là !!!

Dès la sortie de l’hôtel, nous le prenons à nouveau en pleine face et en plus il est froid. Tant pis, on se réchauffe en pédalant à bon rythme. Heureusement, le parcours est beaucoup plus sinueux aujourd’hui ce qui nous permettra d’alterner les périodes avec vent de face et des portions un peu plus abritées.On profite d’un paysage beaucoup plus diversifié que la veille. Les premiers kilomètres se font dans un environnement très vert et feuillu, puis nous rejoignons la Moselle que nous longerons jusqu’à Thionville en passant par la piste cyclable très agréable qui la borde. Petit stop à Metz pour déjeuner. Lucile me fait découvrir la cuisine indienne. Nous mangeons en terrasse sous un beau soleil, le souvenir de la journée de la veille s’éloigne peu à peu. Arrivés à notre destination en milieu d’après-midi, nous en profitons pour nous promener dans cette ville où j’ai effectué mon service militaire³. Je ne reconnais pas grand-chose, voire rien du tout de cette ville qui a beaucoup changé. Après une bière, nous finirons la soirée en achetant une pizza dans un restaurant où la gérante et le personnel étaient tous fort agréable. J’en profite pour leur demander si la caserne existe toujours. Oui, elle est toujours en place !Notre pizza sous le bras, nous faisons un crochet pour aller y jeter un œil avant de manger dans notre chambre d’hôtel.

Au final, une superbe journée de vélo dans une région faite pour ça. Quel bonheur, surtout après le souvenir de celle d’hier.

Pour le quatrième jour, nous partons à destination de Pomerloch au Luxembourg. Il nous faudra pour cela rouler 130 kilomètres et gravir 1256 mètres de dénivelé. La journée sera magnifique. Superbe soleil, pas de vent et des paysages incroyables. La traversée du Luxembourg restera un grand et très beau souvenir. Nous commençons à ressentir un peu la fatigue car les étapes sont solides avec leur dénivelé, d’autant plus que nous les abordons sur des montures de vingt kilos pour Lucile et dix huit pour moi. Les pentes n’en sont que plus raides. La bonne nouvelle, c’est que les effets du covid sont maintenant insignifiants et que je me sens mieux pour finir les journées. En arrivant à l’hôtel, nous découvrons le bus, le camion atelier et la voiture du directeur sportif de l’équipe féminine pro EF !! Lucile voudra bien évidemment sa photo devant le camion.Les filles sont ici pour préparer Liège-Bastogne-Liège. Nous dinerons sur la table d’à côté mais n’échangerons rien d’autres que des regards car les échanges se font en anglais. Difficile de tenter une approche. Et puis, de toute façon, les stars, c’est nous !!!!!! Donc nous évitons de perdre du temps avec des filles qui roulent sur des vélos de six kilos !!!!Trop facile …

Le cinquième jour est la journée la plus redoutée. En effet, nous devons rejoindre Liège, distant de 129 kilomètres (jusque là ça va) mais avec 1593 mètres de dénivelé !! Eh oui, il faut traverser les Ardennes belges,région encore une fois magnifique pour les yeux, surtout sous un soleil radieux… Et on a eu le temps d’admirer le paysage, je vous le garantis !! Vu les difficultés du parcours⁴, notre arrivée sur Liège sera tardive. Mauvaise surprise, nous découvrons également une circulation très hostile envers les vélos. Les infrastructures cyclistes sont quasiment inexistantes et quand elles sont présentes, elles sont dangereuses car mal foutues. Le rêve quoi. Après quelques moments d’errements, nous finissons par trouver notre Airbnb. Vite une douche avant d’aller chercher à manger. Problème : pas d’eau chaude !!!!!! Je ne réussis qu’à me rincer les jambes avant de me mettre à grelotter sévère. Je finis par me coucher sous la couette avec mon survêtement et des chaussettes. Une demi-heure plus tard, je commence à me réchauffer… Nous sortons pour manger mais les magasins sont fermés et les restos trop loin. Nous nous redirigeons donc vers notre location en se disant que l’on mangera mieux demain⁵. En passant devant l’hôtel Campanile qui est à côté de notre logement, nous découvrons sur le parking les bus des équipes proféminines FDJ et ARKEA… Nous finissons au restaurant avec toutes les équipes. A ce stade, nous sommes convaincus d’avoir un ange gardien qui sauve nos pires journées.

Après le repas, alors que nous prenons des photos devant les bus,une personne du staff de la FDJ sort pour nous donner deux bidons. Hyper sympa !Une fois rentrés, nous décidons de changer les plans et de passer une seule nuit à Liège au lieu des deux initialement prévues. Je vais vite me coucher pendant que Lucile cherchera et finira par trouver un autre Airbnb pouvant nous accueillir le lendemain, seulement distant de vingt-cinq kilomètres. Du coup sa nuit à été beaucoup plus courte. Qu’elle en soit ici remerciée⁶.Bilan de la journée, un parcours magnifique ponctué par une arrivée quelque peu chaotique.

Pour le sixième jour, il était prévu un petit tour à vélo pour aller monter les côtes de « La roche aux faucons » et « La redoute », haut lieux de Liège-Bastogne-Liège. Finalement, les plans ayant changé, nous partons de bonne heure pour acheter les gaufres tant désirées. Ensuite, nous prenons un petit-déjeuner dans une boulangerie où nous discutons avec la patronne et un client. La discussion tourne autour de notre voyage, la ville de Liège, le vélo, le sport. Dix minutes après avoir quitté la boulangerie, ce client revient nous offrir deux bidons et deux tours de cou à l’effigie de la ville de Liège. Il nous apprend qu’il travaille au service des sports de la ville. Il a beaucoup apprécié notre échange ainsi que le projet de notre périple donc il voulait nous laisser un souvenir. Trop sympa le gars. Nous ferons ensuite une pause Lavomatic pour laver nos fringues et sentir un peu moins le chacal. Enfin, nous prenons le départ pour Esneux, notre destination du jour. Sur la route, nous nous retrouvons par hasard sur le parcours de la course« La Flèche Wallonne ». Petite pause sandwich assis sur la rambarde de sécurité à discuter avec un cycliste local en attendant les coureurs.Applaudissements à leur passage et nous nous remettons en route vers le gîte, enchantés d’avoir pu profiter de ce moment complètement inattendu.Le temps d’alléger les vélos de leurs lests et nous voila repartis en direction de la « La Roche aux Faucons ». On ne fera que celle-ci car « La redoute » est trop éloignée. Je ne le regretterais pas car La Roche aux faucons me suffira largement !!!! Je vous rappelle que nous sommes censés être dans un jour de repos….

La montée s’effectue en deux blocs : le premier sur environ un kilomètre cinq cent avec un départ immédiat à 10% pour passer à 13% cent mètres plus loin sur une petite route pas large. Cela continue comme ça avant de s’accentuer sur les deux cent derniers mètres où mon GPS affichera 18% !!!!!

Oullioullioulle…….. Petit faux plat descendant sur les cinq cent mètres suivants puis nous attaquons le deuxième bloc long d’environ un kilomètre cinq aussi avec la particularité d’être très régulier. Mais à 14%……Glurps…… Je comprends pourquoi cette côte sert de sélection pour « Liège ». Costaud.

Arrivés en haut, demi-tour pour rejoindre l’appart.Une fois en bas de la descente, Lucile me dit qu’elle va refaire la montée !!! Pour moi,c’est même pas en rêve et je repars en direction du gîte pendant que Lucile va se faire plaisir en montant à son rythme. C’est-à-dire beaucoup plus vite que moi. Sur la première ascension, elle était sur la retenue pour m’attendre car, au contraire de moi, elle aime les forts pourcentages. Elle m’avouera à son retour avoir hésité à la refaire une troisième fois⁷ !!!!!! Ce sera la seule fois ou nous aurons des chiffres différents : 38 kilomètres et 538 de montées pour moi et 55 kilomètres pour 650 de dénivelé pour Lucile.

Encore une très belle journée qui se finira en partageant un cornet de frites géant pendant une promenade en ville.

Pour le septième jour, le départ se fera dans la fraicheur matinale après une très bonne nuit. Le gros du dénivelé se fera au départ(raisonnable : 538 mètres sur 133 kilomètres). Peu après, ma « bourrique » qui,jusque-là était irréprochable, perd ses vis de fixation d’étrier de frein à disque arrière.

Réparation de fortune avec un élastique et nous voilà repartis en direction de Huy pour trouver une solution. Je trouve mon salut dans un magasin de pièces détachées auto disposant de vis adéquates. Vu le retard pris, on en profite pour faire la pause déjeuner dans un café vélo où nous ferons une belle rencontre (encore une) avec les proprios. Très sympa. Un journaliste du club de football du Standard de Liège de passage au resto, copain des proprios, partagera notre repas en discutant avec nous. Super moment. Du coup, le temps passe trop vite et nous nous remettons en route à 14 heures avec cent bornes à parcourir avant de rejoindre notre prochaine location. Le tracé nous fait longer la Meuse ou les paysages sont toujours aussi jolis. On s’accorde une pause glace au bord de l’eau à Namur. Petits moments tout simples mais tellement agréables.

Ce soir, nous dormons dans un chalet après une super belle journée. Vivement demain que cela recommence…

Et aujourd’hui, c’est déjà la dernière. Snif. Nous devrons pour cela parcourir 128 kilomètres et gravir 508 mètres de dénivelé afin de rallier Sedan, terme de notre périple. On démarre en se disant qu’il faut en profiter au maximum. Le parcours nous le permettra car nous longeons la Meuse toute la journée sur une très belle piste cyclable. Nous épouserons donc les méandres du fleuve (et il y en a un paquet) en profitant des paysages toujours aussi majestueux. Le vent nous accompagnera toute la journée et nous ventilera de tous les côtés au gré des virages de la Meuse. Dernière pause repas au bord de l’eau, un peu abrégée à cause de ce maudit vent qui nous malmène en nous refroidissant.

Nous faisons ensuite un petit détour par Charleville Mézières pour un petit café bien mérité. Nous découvrons par hasard la petite boutique d’un ancien commerçant de chaussures qui retape aujourd’hui des vieux vélos vintage avant de les remettre en vente. A nouveau une très belle rencontre. Retour sur la piste en direction de notre hôtel ou nous arrivons de bonne heure. Après la douche de rigueur, nous partons à la découverte de la ville. Une dernière petite bière au pied du château et nous finissons la soirée dans un restaurant très chouette histoire de clôturer comme il se doit cette belle aventure.

Le lendemain,je prends le train en direction de Paris Est tandis que Lucile repart à Dijon. Un peu de tristesse au moment de se séparer car nous avons passé encore une fois de très bons moments. Ce voyage fut un peu plus physique que l’année dernière mais nous le savions. Tout au long de ces 905 kilomètres agrémentés de 7520 mètres de dénivelé, nous avons traversé des régions superbes, vu des paysages fantastiques, rencontré plein de gens gentils, serviables, prévenants et intéressants.

Je voudrais dire un grand merci à Lucile pour nous avoir entièrement préparé un si beau périple.Moi je n’ai fait que pédaler… Et aussi un grand bravo pour sa performance sportive. C’était encore une fois loin d’être évident.

Thierry

Commentaires de Lucile

¹ Avec l’oubli de ce chargeur, je sens bien que je suis passée à deux doigts de me faire déshériter…

² J’étais exactement dans le même état que mon père. Je sentais qu’il commençait à s’énerver, parce que trop de vent depuis trop longtemps. J’ai proposé qu’on s’arrête et j’ai regardé le GPS. Je pensais qu’il nous restait une vingtaine de kilomètres. Lorsque j’ai vu que c’était le double qui nous attendait, je me suis demandée 1) comment j’allais le dire à mon père et 2) comment j’allais les faire ! Toute seule, je me serais probablement morfondue mais, à deux, ce n’est pas possible, on ne peut pas être tous les deux démoralisés. Du coup, on s’est assis sous ce monument aux morts lugubre dans un village lugubre sur un plateau de Langres lugubre et on a mangé une barre au chocolat. Parfois, il n’y a pas grand-chose de plus à faire. La magie de l’itinérance vélo, c’est que tu n’as pas le choix, a fortiori lorsque tu es dans un coin paumé où il n’y a absolument pas le moindre hôtel sur lequel se rabattre en désespoir de cause. L’hôtel est dans quarante kilomètres donc on remonte en selle et on y retourne.

³ Je suis désolée de hacher votre lecture mais la vérité doit être rétablie. Nous sommes arrivés à Thionville, avons déposé nos vélos dans le garage, gravi les marches jusqu’à notre chambre d’hôtel et…mon père a allumé la télé parce que « peut-être qu’on va pouvoir voir la fin de Paris-Roubaix ! ». Dix minutes après être descendue de ma selle, c’était un plaisir de retrouver d’autres gens à bicyclette.

⁴ Pas d’immenses difficultés sur cette journée mais une succession de montées et descentes. Un parcours qui n’a rien d’insurmontable mais qui use. Il est possible qu’au centième kilomètre, j’ai exigé une pause, me sois assise par terre et ai proposé à mon père de m’abandonner au bord de la route.

⁵ Pour moi, il n’a jamais été question de ne pas diner. Négatif. Impossible. Mon père m’a proposé qu’on mange deux barres de céréales puis qu’on aille se coucher. Je ne sais pas comment fait ce type. Après sa journée de vélo, il boit une bière et remet ça le lendemain. Moi, je fais cinq repas dans la journée parce que sinon je perds trop de poids et je m’étire avant d’aller me coucher pour être dans un état à peu près passable pour remonter en selle.

⁶ C’est la magie de l’itinérance. Tu ne sais pas trop où tu vas atterrir. Parfois, c’est génial et puis, d’autres fois, ça l’est moins. Jamais je n’aurais imaginé que circuler à vélo serait aussi dangereux et désagréable dans cette ville. Je ne suis pas craintive à vélo mais là c’était véritablement un enfer. A tel point que j’ai d’abord envisagé de quitter Liège en train en mettant les vélos à bord. Finalement, j’ai tracé un court itinéraire (pour maximiser nos chances de survie) avec tout ce dont nous avions besoin (petit-déjeuner, gaufres, laverie) avant de rejoindre une piste cyclable et quitter la ville.

⁷ Contrairement à mon père, je ne suis pas douée pour passer les bosses en force. Du coup, c’est vrai que je préfère des pourcentages plus importants où je suis avantagée par mon poids et où je peux m’installer dans un rythme. Ce jour-là, il y avait de nombreux cyclistes qui faisaient la montée et l’ambiance particulière m’a beaucoup portée. Il est possible que, si je la refaisais demain, je doive m’arrêter au milieu pour prendre une bouffée de Ventoline.